Alors que les récents scandales concernant l’accueil des tout-petits dans les garderies ont secoué l’opinion publique, et que la ministre des Solidarités, Aurore Bergé, a évoqué […]
Alors que les récents scandales concernant l’accueil des tout-petits dans les garderies ont secoué l’opinion publique, et que la ministre des Solidarités, Aurore Bergé, a évoqué la réduction du congé parental pour le rendre plus incitatif à la reprise du travail, suscitant ainsi une demande accrue de modes de garde formels, l’UFC-Que Choisir publie une étude alarmante sur les disparités territoriales et économiques en matière d’accès à la garde d’enfants de moins de 3 ans. Cela a un impact financier considérable sur les parents. L’association presse les autorités de mettre en place d’urgence un droit opposable à une garde de qualité et abordable, une promesse faite il y a plus de quinze ans.
4 enfants sur 10 exclus
En 2020, il y avait 1,3 million de places en garderie (principalement chez les assistants maternels et dans les crèches) pour 2,2 millions d’enfants de moins de 3 ans, ce qui ne couvre que 58,8 % des besoins. Cela signifie que 4 jeunes enfants sur 10 ne trouvent pas de place. Bien que certains parents choisissent de garder leurs enfants à la maison, le manque de places en crèche ou chez les assistants maternels est subi par bon nombre d’entre eux. En effet, pour 37 % des parents qui gardent leurs enfants, cette option est souvent un dernier recours, et dans près de la moitié des cas (48 %), ils se tournent vers les grands-parents.
Cette situation est d’autant plus inquiétante qu’elle s’inscrit dans une tendance à la baisse de la couverture (-1 point entre 2019 et 2020), due en grande partie à une diminution significative du nombre de places, soit 100 000 de moins entre 2014 et 2020. De plus, les perspectives sont sombres : d’ici à 2030, environ 120 000 assistants maternels prendront leur retraite, ce qui équivaut à 480 000 enfants sans mode de garde !
Des inégalités entre les départements
Le taux de couverture global dissimule des disparités choquantes entre les départements, avec un écart allant jusqu’à plus de 3. Par exemple, il y a 32 places pour 100 enfants de moins de 3 ans en Seine-Saint-Denis, contre 83 en Mayenne. Dans l’ensemble, les taux de couverture sont relativement élevés dans l’ouest de la France, mais nettement moins élevés dans le sud.
L’analyse met également en évidence que ces inégalités départementales se reflètent dans la nature de l’offre de garde. Les assistants maternels sont plus courants en milieu rural et dans les zones moins peuplées, ce qui explique les variations considérables dans le nombre de places disponibles chez les assistants maternels en fonction de la région, allant de 4,6 pour 100 enfants à Paris à 64,8 en Mayenne. Bien que certaines différences puissent être justifiées par des facteurs logiques, il est toutefois surprenant de constater des écarts spectaculaires entre deux départements voisins ayant une densité de population similaire. Par exemple, le Cantal est l’un des départements les mieux pourvus, avec 51,7 places chez les assistants maternels pour 100 enfants, tandis que la Lozère voisine est en dessous de la moyenne, avec seulement 30,6 % de couverture pour les moins de 3 ans.
En ce qui concerne les crèches, le taux varie de 10 places pour 100 enfants en Sarthe à 52,7 à Paris. Naturellement, ce taux est étroitement lié à la densité de population des régions. Cependant, même entre départements géographiquement proches et de densité similaire, les disparités territoriales sont frappantes, avec près de trois fois moins de places pour 100 enfants en Seine-Saint-Denis qu’à Paris.
Offre insuffisante et graves conséquences économiques
L’état actuel de l’offre de garde a des répercussions économiques désastreuses pour les ménages. D’une part, le manque de solutions de garde pour leurs enfants a un impact direct sur l’emploi ou la possibilité d’emploi des parents, en particulier des mères, les privant ainsi de revenus. D’autre part, le type d’offre de garde disponible influe sur le pouvoir d’achat, car les dépenses restant à la charge des parents (après déduction de toutes les aides, dont l’étude souligne la complexité et le manque de transparence) sont en moyenne plus élevées lorsqu’ils ont recours à un assistant maternel plutôt qu’à une crèche. Cette disparité est encore plus marquée pour les familles à faibles revenus. Par exemple, un ménage gagnant trois Smic aura en moyenne des dépenses restant à sa charge de 282 euros par mois s’il utilise une crèche, contre 342 euros s’il opte pour un assistant maternel. Pour les ménages vivant avec un seul Smic, le coût mensuel moyen est de 56 euros en crèche, contre 178 euros avec un assistant maternel, soit plus de trois fois plus élevé. Par conséquent, les familles résidant dans les départements disposant du moins de places en crèches sont les plus durement touchées sur le plan financier.
Des paroles, pas d’actes
Depuis 2007, la création d’un droit opposable à une garde d’enfants en bas âge et d’un service public de la petite enfance a été promise de manière constante par les différents présidents de la République. Cependant, au cours des quinze dernières années, aucune réforme significative n’a été entreprise pour améliorer la qualité de l’accueil. En avril 2022, en raison du manque d’attrait pour les métiers de la petite enfance, une crèche sur deux avait du mal à trouver du personnel (7,6 % des postes étaient vacants).
Face à l’urgence, l’UFC-Que Choisir appelle le Gouvernement à créer un droit opposable à un mode de garde pour les jeunes enfants, à rendre ce droit abordable pour tous et à garantir sa qualité. Il doit mettre en place un pilotage des besoins basé sur des projections démographiques, prendre en compte les naissances et les départs à la retraite des professionnels du secteur. De plus, il doit instaurer une régulation par l’État pour ouvrir des crèches publiques et des maisons d’assistants maternels dans les zones les plus déficitaires, simplifier les aides aux ménages, et systématiser la mise en place de guichets uniques pour faciliter la recherche de mode de garde.
Pour lire l’étude complète, consultez le fichier etudeMGJE.pdf/.