L’Union européenne, soucieuse de la sécurité de ses enfants, a les plateformes d’échanges dans son viseur. À preuve, l’amende de 405 millions d’euros qu’elle vient de coller […]
L’Union européenne, soucieuse de la sécurité de ses enfants, a les plateformes d’échanges dans son viseur. À preuve, l’amende de 405 millions d’euros qu’elle vient de coller à Instagram. Motif : ne pas avoir assez protégé les données personnelles des Européens de moins de 18 ans. On ne badine pas avec l’intimité des jeunes, de surcroît mineurs. Quid des réseaux sociaux et de leurs victimes de plus en plus nombreuses ? Appeler à la responsabilité de ceux qui leur offrent des espaces de discussions, où images et vidéos circulent très librement. Trop ? Cette amende record sera détaillée dans une semaine, a précisé la Commission irlandaise pour la protection des données (DPC), notre Cnil française, qui a déclenché la manœuvre pour l’UE. Sa décision, comme a pu l’être celle récente qui a frappé Google, est facilitée par le Règlement général sur la protection des données (RGPD) qui offre aux régulateurs nationaux les moyens juridiques de protéger les consommateurs des géants de l’Internet.
La régulation, le cauchemar des Big Tech ? Sans doute. Mais dans les faits, les dangers d’Instagram sont réels. Le monde des médias sociaux suscité de nombreuses controverses depuis plusieurs années, notamment leur impact chez les plus jeunes sur leur vision de l’image corporelle, leur propension à les pousser à adopter des comportements risqués, à les rendre plus solitaires et donc plus vulnérables. Instagram a démarré en tant que site web indépendant en 2010 puis a été racheté par Facebook en 2012 avant d’être lancé en tant qu’application en octobre de la même année. Axée sur le visuel, elle permet aux utilisateurs de prendre des photos, d’appliquer des filtres, puis de les partager de différentes manières, notamment dans un flux public que tout le monde peut parcourir ou un flux privé qu’en théorie seuls certains amis peuvent voir, ou encore par le biais de messages envoyés à des personnes spécifiques.
La montée du narcissisme adolescent, le déclin des interactions en face-à-face et la fétichisation de la technologie tout en dévalorisant d’autres formes d’expression créative ont créé un ensemble particulier de conditions qui rendent Instagram et d’autres applications de ce type particulièrement attrayantes pour les jeunes. Une Instamania qui surfe allègrement sur les failles des mineurs : impact négatif sur la façon dont ils perçoivent leur propre corps, augmentation des problèmes de santé mentale tels que la dépression et l’anxiété. Ces dérives ne sont certes pas spécifiques à Instagram, mais elles imposent une surveillance plus sévère, car il y a de vraies raisons de s’inquiéter. Les médias sociaux offrent en effet un lieu où les gens peuvent adopter des comportements dangereux sans être surveillés par les parents ou d’autres figures d’autorité. Instagram est particulièrement alarmant à cet égard puisqu’elle la plateforme peut ouvrir sa porte à la cyberintimidation et à d’autres formes d’abus numériques.
Il faut avoir 13 ans au minimum pour avoir son compte sur Instagram, un enfant en somme. La DPC irlandaise n’a pas agi au hasard, mais a reçu des plaintes d’utilisateurs qui ont vu leur numéro de téléphone et leur mail dévoilés sur tout le réseau. Après enquête, elle a épinglé la possibilité que ces mineurs ouvrent un compte pro qui leur impose de dévoiler au grand public leurs coordonnées. Autre grief, le fait que le contenu de leur compte ait été parfois ouvert par défaut à tout le monde. Meta, anciennement Facebook, groupe qui tient Instagram, qui a précisément son siège régional en Irlande, a annoncé qu’il allait faire appel de cette décision. Son rêve : le Metaverse, le monde virtuel à la portée de tous. Le prochain bac à sable de nos petits ?