C’est la ruée dans le réseau Total depuis le 1er septembre, date du rajout d’une ristourne de 20 centimes du géant pétrolier aux 30 centimes accordés […]
C’est la ruée dans le réseau Total depuis le 1er septembre, date du rajout d’une ristourne de 20 centimes du géant pétrolier aux 30 centimes accordés par l’État. Prises d’assaut, certaines stations-service n’avaient pas vu cette effervescence depuis les grèves et blocages des raffineries fin 2019 : files d’attente interminables, tensions extrêmes devant les pompes… si bien que trois ou quatre jours après ce raz de marée, près d’une centaine d’entre elles agitaient le drapeau blanc : rupture de stock. À 1,50 le litre d’essence – 50 centimes de réduction au total –, il faut dire qu’on n’a pas hésité à parcourir de nombreux kilomètres et vider son réservoir, le GPS clignotant sur l’une des 3 500 enseignes arc-en-ciel, dont certaines avaient même fini par être encadrées par des gendarmes pour juguler les échauffements. Il y a peu, les Belges ou les Allemands voyaient venir s’approvisionner chez eux les frontaliers de France ; pouvoir d’achat oblige, ce début septembre, ce sont ces mêmes Européens qui ont pris leur voiture pour faire le chemin inverse. Face à une telle baisse des prix à la pompe, même les stations des supermarchés, réputées moins chères et préférées par les automobilistes, sont délaissées.
Et c’est bien ce qui a fait réagir ces 6 et 7 septembre les groupes E. Leclerc et Systèmes U qui réclament un geste de TotalEnergies, puisqu’ils sont eux-mêmes distributeurs de son carburant. Hier, Michel-Édouard Leclerc, président du comité stratégique des centres E. Leclerc, soulignait sur RTL que Total se retrouvait dans une position inconfortable « de fournisseur et de concurrent. », annonçant qu’il avait écrit au président du groupe pétrolier pour lui demander de baisser ses prix de grossiste afin de faire bénéficier ses clients de cette fameuse remise de 20 centimes. Il rejoignait ainsi le patron de Systèmes U, Dominique Schelcher qui avait tenu le même discours la veille sur BFMTV. Cette logique implacable des deux enseignes est difficilement contestable et explique peut-être l’absence de réponse – pour l’heure – de Total. D’autant qu’un argument de poids a été ajouté à l’insuffisance manifeste de stock : Total ne dessert pas ou peu les zones rurales, contrairement aux supermarchés.
Michel-Édouard Leclerc n’a pas hésité à parler de distorsion de la concurrence, faisant remarquer au passage le silence des pouvoirs publics sur le sujet. Cet accommodement ressemble bien à un arrangement entre l’État et TotalEnergies – alors que se profilait il y a peu une possible taxe sur les superprofits – au détriment des enseignes distributrices qui risquent de voir partir leurs clients. Pour rappel, ces ristournes baisseront au fil des mois : celle de l’État passera de 30 centimes en septembre et octobre à 10 centimes en novembre et décembre ; celle de Total tombera à 10 centimes le litre du 1er novembre au 31 décembre. Ensuite, l’hiver devrait être chaud bouillant devant les pompes, d’autant que les supermarchés seront bien tentés de proposer des offres concurrentielles comme ce fut le cas de Leclerc en été avec son essence à prix coûtant. On l’a bien vu, il suffit de quelques centimes de différence sur le litre pour faire changer de direction aux GPS…