En 2024, Tracfin a franchi un nouveau seuil en dépassant pour la première fois les 200 000 déclarations de soupçon reçues, un indicateur fort de l’évolution du dispositif national de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Avec 215 410 informations recensées, dont 211 165 émanant des 50 professions assujetties, la progression annuelle de 13,2 % confirme que les actions de sensibilisation et de formation commencent à porter leurs fruits auprès des professionnels concernés.
Le secteur financier reste de loin le plus actif, représentant à lui seul plus de 93 % du flux, avec les banques et établissements de crédit responsables de 57,2 % des signalements. Mais la dynamique touche aussi de nouveaux acteurs, à l’image des établissements de paiement, des plateformes de monnaie électronique et des prestataires de services sur actifs numériques, qui ont vu leurs déclarations plus que doubler en un an. Cette montée en puissance s’explique par l’évolution des usages et des technologies financières, qui entraînent l’émergence de risques nouveaux que Tracfin s’emploie à cartographier et à maîtriser.
Le secteur non financier, encore minoritaire dans les volumes, connaît néanmoins une hausse remarquable de 25,7 %. Certaines professions jusque-là peu mobilisées affichent une nette progression, à l’image des opérateurs de ventes volontaires dans le secteur de l’art et du luxe, qui ont multiplié par plus de trois leurs déclarations en un an. À l’inverse, d’autres restent à la traîne, comme les avocats avec seulement 15 déclarations transmises malgré un effectif national dépassant les 75 000 professionnels. Quant aux agents sportifs, bien que soumis au dispositif depuis 2010, aucun signalement n’a encore été enregistré.
Deux nouvelles professions ont officiellement rejoint en 2024 le périmètre LCB-FT : les entreprises de jeux à objets numériques monétisables et les gestionnaires de crédit. Elles devront désormais s’approprier les obligations déclaratives et contribuer à l’effort collectif de détection. D’autres devraient suivre prochainement, notamment les clubs de football professionnels et les négociants de biens de grande valeur, dans le cadre de la transposition en droit français du sixième paquet européen contre le blanchiment.
Au-delà des volumes, Tracfin continue de cibler l’amélioration qualitative des signalements. Des échanges constants sont organisés avec les professionnels déclarants et les régulateurs pour fiabiliser la donnée et affiner les formats d’information. Un chantier d’harmonisation des relevés d’opérations bancaires a ainsi été lancé avec l’ACPR, pour mieux structurer et exploiter les données opérationnelles.
Parallèlement, le volume d’informations transmises par les partenaires publics progresse également. En 2024, ce sont 2 558 signalements émanant d’organismes publics, d’autorités de contrôle, d’ordres professionnels et d’administrations qui ont été reçus, soit une hausse de 5,4 %, dans le prolongement d’une tendance soutenue ces dernières années.
Sur le plan international, Tracfin a renforcé sa coopération et consolidé sa position stratégique. Le service a pris part aux travaux de mise en place de l’Autorité européenne de lutte contre le blanchiment (Amla) et a organisé la 30ᵉ réunion plénière du Groupe Egmont à Paris, rassemblant plus de 170 cellules de renseignement financier du monde entier. Ces actions confortent le rôle de Tracfin au sein du dispositif international et favorisent la fluidité des échanges avec ses homologues, indispensable pour suivre des flux financiers toujours plus transnationaux. En 2024, Tracfin a reçu 1 687 informations issues des CRF étrangères, attestant de la montée en puissance de la coopération opérationnelle.
Service de renseignement financier de Bercy, Tracfin agit sous l’autorité d’Éric Lombard et d’Amélie de Montchalin. Intégré au premier cercle de la communauté nationale du renseignement, il participe activement à la défense des intérêts économiques du pays et à la lutte contre les ingérences et le terrorisme financier, en s’appuyant sur trois missions prioritaires : lutter contre la criminalité économique et financière, prévenir la fraude aux finances publiques et protéger les intérêts fondamentaux de la Nation.