À partir du 20 juin 2023, le château de Versailles propose au public de redécouvrir un ensemble de pièces parmi les plus secrètes de l’ancienne résidence royale […]
À partir du 20 juin 2023, le château de Versailles propose au public de redécouvrir un ensemble de pièces parmi les plus secrètes de l’ancienne résidence royale : les cabinets intérieurs de la Reine. Le résultat de plusieurs années de recherches et de restauration permet aujourd’hui de retrouver la cohérence et la richesse d’un espace éminemment féminin se déployant sur deux étages du Château.
Le cabinet de la méridienne, la bibliothèque et le cabinet doré
Derrière les lambris dorés et les tentures de soierie du grand appartement de la Reine se cache, sur deux étages, un ensemble de pièces aux dimensions modestes et dont les fenêtres donnent sur de petites cours intérieures. Il s’agit du petit appartement de la Reine, que Marie-Antoinette commence à aménager à partir de 1774.
Le premier étage de ces espaces personnels comporte des pièces qui étaient réservées à l’usage de la souveraine. Un cabinet dit « de la Méridienne » – nommé ainsi en raison de l’ottomane placée dans une alcôve garnie de glaces au teint – fut aménagé en 1781 pour Marie-Antoinette. Cette pièce présente l’un des décors les plus précieux du Château, rappelant la félicité du couple royal au moment de la naissance de leur premier fils. Un long travail de recherche mené par la conservation a permis la restitution du dernier état textile de couleur lilas aux différents tons de vert qui ornait la pièce sous Marie-Antoinette.
La bibliothèque adjacente, récemment restaurée elle aussi, présente un décor d’une grande finesse, datant également de 1781 : dorures en trois tons, portes dissimulées par de fausses reliures et ingénieuses étagères soutenues par des crémaillères signent cette singulière pièce. Les restaurations du cabinet de la Méridienne et de la bibliothèque ont été rendues possibles grâce à un mécénat de la Société des Amis de Versailles.
Ensuite se trouve le grand cabinet intérieur ou cabinet doré. Marie-Antoinette y fit tendre en 1779 une soierie d’une richesse prodigieuse au décor de fleurs, arabesques et médaillons dorés, remplacée en 1784 par un nouveau décor de boiseries sculptées inspirées par l’égyptomanie naissante. Ce décor donna dès lors le nom de « Cabinet doré » à la pièce, qui bénéficia il y a quelques années d’une restauration complète.
Le second étage, un air de liberté
Juste au-dessus du premier étage, la reine aménagea, dès 1774, un ensemble de petites pièces réservées à son usage ainsi qu’à ses premières femmes de chambre et à son service. Les deux étages étaient reliés par de petits escaliers, dont celui dit du Billard, situé derrière l’alcôve de sa Grande Chambre. Après une longue recherche archivistique sur l’usage et la hiérarchie de ces pièces ainsi que sur la toile de Jouy originale et sa production à cette époque, l’ensemble de ces pièces sera restauré, pourvu d’un nouveau décor textile et remeublé.
Le public sera invité à découvrir un nouvel aménagement évoquant la vie intime de Marie-Antoinette. Les espaces se composent ainsi : deux pièces « à la Reine », c’est-à-dire une salle à manger et un boudoir, un cabinet du Billard (un jeu dont la cour raffolait depuis Louis XIV) devenu salon de compagnie, trois pièces dévolues aux Premières femmes de chambre et trois pièces pour le service. La restitution des toiles de Jouy, élément central du réaménagement du deuxième étage, a été réalisée pour la plupart selon la technique traditionnelle au cadre plat, mettant en valeur la préservation des métiers d’art, grâce au mécénat et au savoir-faire de la Maison Pierre Frey. Ainsi, les pièces à la Reine seront par exemple décorées de la toile au Grand Ananas, l’une des plus belles productions de la Manufacture de Jouy au XVIIIe siècle.
Ces pièces seront remeublées avec de nouvelles acquisitions et un ensemble de meubles et d’objets d’art restaurés et regarnis. Chaque espace évoquera un pan de vie de la souveraine : Madame Campan, sa Première femme de chambre, son entourage notamment les princesses de Chimay et de Lamballe, la famille royale et sa relation de grande proximité avec ses enfants. Une pièce présentera des échantillons de textiles du XVIIIe de ces cabinets, et une dernière pièce dédiée au souvenir de la souveraine.
Marie-Antoinette et son besoin d’intimité
Peu de temps après son arrivée à Versailles en 1770, Marie-Antoinette prit possession de l’appartement de Marie Leszczynska au premier étage ainsi que de quelques cabinets privés situés au revers. Audacieuse, d’un goût très sûr et consciente de son rang d’archiduchesse d’Autriche et de future reine de France, elle ordonna très tôt des travaux d’embellissement. Ses exigences et son impatience attirèrent même la désapprobation du Premier architecte du roi Ange Jacques Gabriel.
Ces multiples aménagements qui se poursuivirent à un rythme croissant trahissaient aussi le besoin d’intimité d’une jeune femme vive et naturellement encline à l’indépendance. Dans ces cabinets, véritable lieu de vie de la reine, à l’accès contrôlé, Marie-Antoinette se reposait des fatigues de la cour et recevait ses enfants et un cercle d’amis choisis.
Jusqu’en 1788, elle n’aura de cesse de transformer, étendre, aménager, enjoliver ses cabinets, le décor étant sa vraie passion. Elle fit donner à ces pièces un ameublement des plus élégants, témoin de l’harmonie et de la perfection des arts décoratifs français à la fin de l’Ancien Régime.