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Fraude fiscale internationale : la riposte française porte ses fruits en 2024

Par Gilbert Caron
Publié le 23 octobre 2025 à 08h04 – Temps de lecture : 4 minutes

Face à une mondialisation toujours plus complexe des mécanismes d’évasion et de fraude fiscales, la France a décidé d’intensifier sa riposte. En 2024, la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) a renforcé son action internationale, aboutissant à une nette progression des résultats. Le nombre d’opérations de contrôle fiscal impliquant des montages internationaux a augmenté de 9 %, couvrant aussi bien les entreprises que les particuliers.

Du côté des entreprises, la hausse est particulièrement marquée : les redressements fiscaux notifiés en matière d’impôts professionnels ont bondi de 23 %, atteignant 5,2 milliards d’euros. Plus de la moitié de ces rectifications, soit 64 %, concernent les prix de transfert pratiqués par les groupes multinationaux. Ces stratégies, souvent qualifiées de planification fiscale agressive, consistent à transférer artificiellement des bénéfices réalisés en France vers des filiales situées à l’étranger, dans des pays où la fiscalité est plus avantageuse. Ces pratiques, considérées comme particulièrement dommageables pour les finances publiques, demeurent une cible prioritaire pour les services de Bercy. Les transactions avec les États ou territoires à fiscalité privilégiée continuent, elles aussi, de faire l’objet d’une vigilance renforcée.

La lutte contre la fraude à la TVA constitue un autre axe majeur de cette mobilisation. Les contrôles menés en 2024 ont permis de rappeler 303 millions d’euros de droits de TVA, contre 283 millions l’année précédente. Le commerce en ligne, secteur où prospèrent encore des fraudes à grande échelle, reste sous étroite surveillance. La DGFiP utilise désormais toute la panoplie d’outils prévus par les dernières lois de lutte contre la fraude : suspension des numéros de TVA intracommunautaire des vendeurs douteux, mise en œuvre de la solidarité entre plateformes de vente et commerçants, déréférencement des opérateurs qui ne reversent pas la TVA due, ou encore mesures conservatoires contre les sociétés éphémères insolvables. Ces dispositifs visent à prévenir les montages frauduleux avant même l’ouverture d’un contrôle fiscal et, lorsque cela s’avère nécessaire, à en judiciariser les suites.

Les particuliers ne sont pas en reste. Les contrôles ciblant leurs revenus ont permis de notifier plus de 600 millions d’euros de droits en 2024. Les agents de la DGFiP se sont notamment concentrés sur les cas de délocalisations fictives, par lesquelles certains contribuables prétendent avoir transféré leur résidence fiscale à l’étranger pour échapper à l’impôt en France. La dissimulation de revenus dans des États à fiscalité privilégiée a également été un point d’attention. Les contrôles sur le patrimoine, de leur côté, affichent une hausse spectaculaire de 45 %, avec 197 millions d’euros de droits rappelés contre 135 millions en 2023.

Ces résultats traduisent non seulement un renforcement de la vigilance française, mais aussi une coopération internationale plus efficace. Les échanges d’informations entre administrations fiscales se sont multipliés, qu’ils soient automatiques ou effectués à la demande. L’évolution des normes européennes et internationales a permis d’étendre ces échanges à de nouvelles catégories d’actifs et de revenus, améliorant ainsi la détection des fraudes transfrontalières. Depuis 2025, la DGFiP dispose d’un accès élargi aux données relatives aux paiements transfrontaliers, une avancée déterminante pour mieux cibler les contrôles dans le secteur du commerce électronique.

À l’horizon 2027, une nouvelle étape sera franchie avec la mise en œuvre de la directive européenne DAC8, qui instaurera l’échange automatique des informations sur les crypto-actifs. Les contribuables détenant ce type d’actifs à l’étranger sont d’ores et déjà invités à les déclarer, s’ils ne l’ont pas encore fait, dans le cadre du droit à l’erreur reconnu par la législation fiscale.