Dans un monde où le numérique et l’intelligence artificielle ne se contentent plus d’accompagner nos vies, mais redessinent nos sociétés et nos rapports de force, la France vient de se doter d’un nouvel organe de réflexion stratégique. Son nom : le Conseil national de l’IA et du Numérique. Son ambition : éclairer les choix publics à l’heure où algorithmes, données et cybersécurité sont devenus des affaires d’État. Clara Chappaz, ministre déléguée chargée de l’Intelligence artificielle et du Numérique, a officialisé mardi la naissance de cette instance inédite, pensée comme un laboratoire d’idées et de vigilance, à la croisée de la technologie et de la politique.
Successeur du Conseil national du numérique, le CIAN entend dépasser les clivages et fédérer autour de la table des experts, des parlementaires et des personnalités issues de la société civile. Car aujourd’hui, les questions numériques ne relèvent plus seulement de l’innovation ou du marché : elles touchent à l’éthique, à la souveraineté, à la démocratie et à l’environnement. Face aux géants technologiques, aux usages massifs de l’IA et à la géopolitique sous tension, la France veut se donner les moyens de penser avant d’agir.
Pour présider ce nouveau conseil, deux figures bien connues du secteur. D’un côté, Anne Bouverot, présidente du conseil d’administration de l’École normale supérieure et cofondatrice de la Fondation Abeona, engagée pour un développement responsable de l’intelligence artificielle. De l’autre, Guillaume Poupard, ancien patron de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI), aujourd’hui directeur général adjoint de Docaposte. Un tandem expérimenté, aux parcours complémentaires, chargé de piloter les travaux de quatorze membres permanents, renforcés ponctuellement par des invités selon les sujets.
Car le CIAN ne sera pas une instance figée. Il fonctionnera en mode agile, par groupes de travail thématiques : éthique des algorithmes, souveraineté numérique, IA dans les services publics, cybersécurité, impact écologique du numérique… Les chantiers sont nombreux et les enjeux colossaux. Pour les mener, le Conseil s’appuiera sur le Haut-Commissariat à la stratégie et au plan et travaillera en étroite coopération avec d’autres institutions comme le Conseil économique, social et environnemental ou le Conseil d’analyse économique.
« Le numérique n’a jamais été aussi politique », a rappelé Clara Chappaz en présentant ce nouvel outil stratégique. Elle a salué au passage l’action du Conseil national du numérique, qui passe ainsi le relais au CIAN. La liste complète de ses membres sera rendue publique dans les prochains jours, avec la publication du décret de création et des arrêtés de nomination. D’ici là, le Conseil peut déjà s’atteler à définir ses priorités dans un paysage technologique qui file à toute vitesse. Objectif : garder la main sur les révolutions en cours et penser collectivement l’avenir numérique du pays.