Ce 9 août, une proposition de loi a été déposée à l’Assemblée nationale par le député LREM Sacha Houlié pour donner le droit de vote aux étrangers […]
Ce 9 août, une proposition de loi a été déposée à l’Assemblée nationale par le député LREM Sacha Houlié pour donner le droit de vote aux étrangers aux municipales – depuis 30 ans, seuls les citoyens de l’UE y sont autorisés.
Considérant que sa proposition augure « un beau et long combat », l’également président de la Commission des lois a rappelé que le pays bénéficierait d’un modèle d’intégration plus fort. Son texte veut en effet lutter contre le communautarisme en prenant en compte toutes les personnes de l’immigration qui participent et font la société depuis des décennies. La discrimination entre deux groupes d’étrangers – étrangers européens et non européens – est par ailleurs dénoncée…
Ce sujet, aussi brûlant que sempiternel, symbolise surtout le reniement des politiques, quel que soit leur bord. Si le candidat Mitterrand le remet sur le gril dans son programme de campagne en 1981, le président Mitterrand choisit finalement de faire marche arrière. Motif admis plus tard, les Français n’étaient pas prêts pour une telle réforme. Sept ans plus tard, le président redevenu candidat, qui cherche à se faire réélire, relance le débat. SOS Racisme est passé par là… Mais l’opinion publique réagit mal : les mœurs n’ont pas avancé et le Socialiste est réélu sans droit de vote aux étrangers.
La droite aussi s’y est frottée. En 2005, au nom de l’intégration des immigrés, leur droit de déposer leur bulletin dans l’urne municipale ne paraît pas anormal, aux yeux d’un Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur de Jacques Chirac. À condition que lesdits étrangers vivent légalement en France, travaillent, paient des impôts et y résident depuis au moins dix ans. Chirac lui, table davantage sur la naturalisation, la nationalité française ouvrant logiquement ce droit. En 2007 puis en 2012, Sarkozy, devenu président, s’oppose à ce droit de vote, une proposition qualifiée alors de risquée – pas que politiquement croit-on comprendre.
Le retour des socialistes au pouvoir remet de l’huile sur le feu. Le candidat Hollande promet d’accorder le droit vote aux scrutins municipaux aux étrangers non communautaires et résidant légalement en France depuis cinq ans, via une grande réforme. En 2014, il réitère son engagement en annonçant qu’un texte serait présenté avant la fin de son quinquennat. Un an plus tard, Manuel Valls, premier ministre, remet cette proposition, qui n’est pas une priorité selon lui, aux calendes grecques.
Aujourd’hui, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, le président par intérim du RN Jordan Bardella ou encore le député LR Éric Ciotti ont marqué leur franche opposition, voire leur indignation. Ian Brossat, porte-parole du PCF et adjoint au maire de Paris, a lui-même exprimé une certaine prudence sur le sujet. Au contraire, le député de la Manche Stéphane Travers, socialiste passé à LREM, ancien ministre de l’Agriculture, a applaudi l’initiative de son collègue. Le président Emmanuel Macron s’est, quant à lui, plutôt rangé du côté de l’avis du défunt Chirac en subordonnant le vote des étrangers à leur demande de nationalité française.
En tout état de cause, cette proposition de loi fait grincer des dents, même dans le propre camp du député Houlié qui a cru bon de préciser que ce texte était déposé « à titre personnel ». Une fois n’est pas coutume, un clivage gauche/droite existe bien au sein même du très présidentiel LREM. Pour garder les esprits au calme, un groupe de travail sur les questions d’immigration sera créé à la rentrée, a annoncé la porte-parole du groupe Aurore Bergé. Rappelons que ce texte, s’il était adopté par l’Assemblée nationale, devra être entériné par le Sénat tenu majoritairement par la droite, avant d’être soumis à un référendum avec cette question qui tournera en filigrane : l’immigration : une solution ou un problème ?