À l’heure des premières récoltes, la sécheresse de cet été fait craindre le pire pour la pomme de terre. L’Union rassemblant ses producteurs (UNPT) estime les […]
À l’heure des premières récoltes, la sécheresse de cet été fait craindre le pire pour la pomme de terre. L’Union rassemblant ses producteurs (UNPT) estime les pertes à plus de 200 millions d’euros, du jamais vu depuis 2000, un recul d’au moins un cinquième par rapport à la moyenne des deux dernières décennies. Avec ses huit millions de tonnes en 2021 et ses 4 milliards d’euros de chiffre d’affaires, la France risque bel et bien de perdre sa place de premier exportateur mondial de pommes de terre. Les pertes évaluées à 1,5 million de tonnes la mettent d’ores et déjà loin, très loin de l’excédent commercial plus de 500 millions d’euros réalisé l’an dernier. Chez certains agriculteurs, faute d’irrigation, on annonce une production diminuée de moitié, « une année noire », déplorent-ils.
Les chaleurs extrêmes qui ont frappé le pays, combinées aux fortes restrictions d’eau – une sécheresse équivalente à celle de 1976 avec trois fois plus d’épisodes caniculaires, selon le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Marc Fesneau – ont mis à mal ce légume composé essentiellement d’eau : tubercules insuffisamment développés, feuilles jaunies, taille réduite… Résultat : les patates sont petites, déformées, invendables ou vendues moins cher au détriment du producteur. Le 18 août dernier, Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA, syndicat majoritaire de la profession, parlait déjà des dégâts de cette sécheresse dont le chiffrage sera très important, relevant ses impacts sur la vigne et l’arboriculture qui ont des racines plus profondes… « Aujourd’hui dans certains types de produits, on est à -25 ou – 30 % de production », soulignait-elle. Toutes les terres sont touchées. On prévoit une baisse de production de 18 % sur le maïs grain par rapport à août 2021 et de 21 % sur la production d’herbe qui met les éleveurs sous pression puisque bon nombre d’entre eux ont déjà entamé leurs stocks de fourrage prévus pour l’hiver, quand ils n’ont pas vendu une partie de leurs bêtes prématurément. Et ce ne sont pas les petites pluies encore moins les violents orages qui vont améliorer la situation, la période de recharge des nappes ne se déroulant qu’à l’automne quand les végétaux ne prennent plus d’eau.
Pour sauver les exploitations, l’UNPT demande que les prix payés aux agriculteurs soient revalorisés, mais aussi que la grande distribution soit moins gourmande et plus souple en cette période de crise, autrement dit une plus juste répartition de la valeur ajoutée (pour ne pas pénaliser le consommateur) et moins d’exigences en termes de volumes. Aujourd’hui, le producteur touche 20 % du prix et le distributeur 50 % d’une pomme de terre achetée en supermarché, un comble. Des premières mesures de soutien ont été annoncées par le ministre il y a une petite semaine comme la mobilisation du régime de calamités agricoles – mais essentiellement les prairies, le renforcement des avances versées dans le cadre de la politique agricole commune ou encore les exonérations de taxe sur le foncier non-bâti et de cotisations sociales. Pour les producteurs, il faut plus d’efforts au regard de cette saison exceptionnelle : hausse du taux d’indemnisation, baisse du taux minimal des pertes pour étendre ces indemnisations à plus d’exploitations. Les pouvoirs publics doivent saisir l’urgence, quitte à redéfinir cette belle notion qu’est la solidarité nationale.