Sobriété énergétique, l’expression en vogue fait beaucoup de bruit… et prochainement moins de lumière. Le ministère de la Transition énergétique a annoncé en effet que de nouvelles règles seront mises en œuvre, par décret d’ici à la fin de l’été – le temps de son examen par le Conseil d’État –, pour harmoniser l’interdiction des publicités lumineuses. Ces écrans publicitaires (LCD numérique) sont particulièrement énergivores : un seul d’entre eux de 2 m2 consomme l’équivalent de ce que dépense chaque année un ménage pour son éclairage et son électroménager – chauffage non compris, soit 2,049 kWh/an, note par exemple l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).
La question n’est pas nouvelle. Un décret vieux de dix ans prévoit que ces publicités éclairées et non moins insensées soient éteintes entre 1h et 6h du matin, sauf pour les aéroports (les gares devraient être également exemptées dans le nouveau décret) et les agglomérations de plus de 800 000 habitants… où le maire garde la main sur les ampoules. Et c’est bien là le problème puisque peu de communes éteignent ou font éteindre leurs lumières, et lorsque c’est le cas, la pratique est plutôt récente, les effets désastreux du changement climatique ayant manifestement tardé à être admis.
Ce problème induit par les écrans de vidéos publicitaires avait été soulevé il y a plus de deux ans lors de la Convention pour le climat, les « 150 » citoyens voulant les interdire dans l’espace public, les transports en commun et dans les points de vente, mais cette proposition n’avait pas été retenue au final. Pourtant, estime encore l’Ademe, 30 % d’économies d’énergie pourraient être faites sur le seul éclairage public, soit 175 000 tonnes de CO2. Pour les communes, couper la lumière pendant la nuit, de minuit à 5h par exemple, leur fait faire de grosses économies sur leur facture d’électricité, de l’ordre de 50 %.
L’extinction des publicités lumineuses varie donc sur le territoire selon la taille des villes. Mais surtout, elles ne sont jamais vraiment respectées par les magasins. Il suffit de se balader dans les grandes artères des agglomérations pour constater l’ampleur de cette pollution lumineuse. Les jeunes du collectif On the Spot Parkour témoignent de cette irresponsabilité des commerçants, lors d’opérations nocturnes bien nommées « light off » : ils éteignent « sportivement » leurs enseignes en grimpant sur les façades jusqu’aux interrupteurs. Une mission d’utilité publique !
Aujourd’hui, il semble que l’insuffisance de contrôles fait prendre tous les risques aux propriétaires et gérants des enseignes, malgré les sanctions lourdes qu’ils encourent : mise en demeure d’une durée allant jusqu’à 5 jours et amende de 1 500 euros jusqu’à 7 500 euros. Les associations environnementales qui ont pris acte de cette décision ministérielle demandent d’ailleurs à ce que cette future réglementation soit véritablement porteuse, autrement dit que soient mis en place une surveillance efficace et de vraies peines dissuasives.
Un second décret, annoncé par la ministre Agnès Pannier-Runacher, devrait généraliser à la même période l’interdiction des portes ouvertes des commerces climatisés pendant l’été (les villes comme Paris ou Lyon ont pu la tester avec succès et quelques amendes aux récalcitrants) et chauffés pendant l’hiver, en prévision d’une saison qui risque d’être énergivore alors que les prix déjà élevés du gaz et de l’électricité depuis le début de la guerre en Ukraine menacent de grimper encore plus haut.