L’impact des événements inattendus sur la carrière des managers

Pour la première fois, une étude examine le rôle des événements imprévus, qu’ils soient positifs ou négatifs, sur la réussite professionnelle des cadres en Europe. Alors que les […]

Pour la première fois, une étude examine le rôle des événements imprévus, qu’ils soient positifs ou négatifs, sur la réussite professionnelle des cadres en Europe. Alors que les événements positifs ont généralement un impact favorable sur les carrières, les résultats montrent aussi que 71 % des personnes ayant vécu une situation négative ont constaté un impact positif sur leur carrière.
La chance et le hasard tiennent un rôle dans toute réussite professionnelle. La chance peut résulter du fait de se trouver au bon endroit au bon moment, d’une rencontre fortuite ou d’un événement inattendu. La plupart des études managériales se concentrent sur les facteurs susceptibles de conduire à la réussite professionnelle, et à des routes de progression de carrière linéaire, et ignorent souvent le rôle des événements fortuits et la manière dont ils peuvent affecter les carrières.
Pour combler cette lacune, Céline Legrand, Christine Naschberger (Audencia), Yehuda Baruch (Audencia et Southampton Business School) et Nikos Bozionelos (EM Lyon Business School) ont mené une étude auprès d’un large échantillon de cadres européens afin de déterminer l’impact de ces événements fortuits sur leur carrière. Au total, 682 managers ont été interrogés.

L’étude
Trois questions ont été posées aux participants : la prévalence et la nature des événements inattendus qu’ils ont vécus, leur impact sur la carrière des participants, et la manière dont les caractéristiques individuelles des participants sont liées à ces événements et à l’impact sur leur carrière.
La majorité des participants (62,17 %, soit 424 sur 682) ont vécu un événement imprévu qui a eu une influence significative sur leur carrière. Parmi eux, 414 ont indiqué la nature de l’événement et son impact. 320 répondants (77,29 %) ont déclaré avoir vécu des événements fortuits positifs, tandis que 94 (22,71 %) ont vécu des situations négatives.
Les résultats ont permis à l’équipe de recherche d’identifier quatre scénarios :
• un événement négatif menant à un impact positif, peut-être le cas le plus intrigant, ce résultat s’applique néanmoins à la plupart des personnes ayant vécu des événements négatifs : 71,28 % (67 sur 94) des répondants ont vécu un événement fortuit négatif, mais ont rapporté un impact positif sur leur carrière. Les événements négatifs allaient de la restructuration, réduction des effectifs, fermeture soudaine de l’organisation à des problèmes tels qu’un nouveau manager toxique. Parmi les impacts positifs cités : l’adoption d’une nouvelle orientation professionnelle, un changement d’entreprise ou de secteur qui s’est avéré bénéfique pour la carrière du participant ;
• un événement positif entraînant un impact négatif : seuls 3,13 % des cas (10 sur 320) entrent dans cette catégorie. Les événements positifs concernent principalement des opportunités professionnelles de mobilité interne ou externe, permettant de consacrer plus de temps aux loisirs et à la famille. Rares, mais intrigants, les résultats mentionnent aussi des conséquences telles que la stagnation de la carrière, la rétrogradation ou une vie professionnelle perçue comme moins satisfaisante ;
• un événement négatif entraînant un impact négatif : 28,72 % (27 sur 94) des répondants ont signalé des cas d’événements négatifs entraînant un impact négatif. Comme dans le premier scénario, ce type d’aléas comprenaient la restructuration de l’entreprise, la perte d’un emploi et des problèmes dans les relations avec les supérieurs, y compris de graves désaccords avec la direction. Les impacts négatifs comprenaient des difficultés à retrouver un emploi de niveau similaire, une carrière bloquée, un changement de poste défavorable ou encore une détérioration des conditions de travail ;
• un événement positif conduisant à un impact positif : le cas logiquement le plus fréquent : 96,88 % (310 sur 320) des répondants ont indiqué un impact positif résultant d’événements également positifs, avec un ratio hommes/femmes de 56,77 %/43,23 %. Parmi ces événements positifs, les participants ont cité le hasard de rencontres professionnelles débouchant sur des opportunités de développement de carrière grâce à la mise en réseau, au coaching, au mentorat ou à l’accès à des informations sur des offres d’emploi. À la clé parmi les impacts favorables, une promotion ou de nouveaux défis professionnels qui renforcent la confiance en soi des salariés.
Les événements inattendus ont ainsi joué un rôle important dans la carrière professionnelle de plus de six participants sur dix. Un autre point intéressant est que ceux qui n’ont pas rapporté d’événements fortuits significatifs avaient tendance à gagner moins et à avoir en moyenne un statut inférieur, bien qu’ils aient moins de cas d’épuisement professionnel et des niveaux plus élevés de bien-être au travail.
Pour les auteurs de l’étude, les connaissances sur le rôle de ces événements imprévus sur les carrières peuvent non seulement améliorer notre compréhension de la progression professionnelle, mais aussi être utilisées pour élaborer des lignes directrices à l’intention des professionnels et des organisations. Les événements fortuits peuvent donc être un catalyseur majeur pour les carrières. Ils peuvent provoquer des chocs et influencer le développement professionnel dès les prémices d’une carrière. Il est donc important de reconnaître et de prendre en compte ce phénomène et de ne pas continuer à considérer les carrières comme une simple progression linéaire.

Les enseignements
La gestion durable des carrières dans un environnement volatile, incertain, complexe et ambigu suggère que les professionnels des ressources humaines devraient être conscients de la nature imprévisible des événements qui peuvent orienter les carrières managériales. Le mentorat, l’orientation professionnelle et les approches de coaching flexibles sont nécessaires pour aider à naviguer dans le labyrinthe des différents parcours professionnels. La capacité d’adaptation est une compétence managériale clé et la résilience des compétences non techniques peut être un facteur de réussite. Les organisations devraient donc former leurs cadres à la résilience et à l’agilité.