Un projet inédit au croisement de la technologie, de la science et de l’écologie a été dévoilé à Marcoussis, dans l’Essonne. Le groupe Data4, leader français des centres de données en Europe, et la Fondation de l’Université Paris-Saclay ont annoncé le lancement du tout premier datacenter bio circulaire au monde. Cette innovation d’envergure repose sur un principe simple, mais visionnaire : valoriser la chaleur dégagée par les serveurs pour cultiver des microalgues capables de capter le CO2, et les transformer en biomasse utile pour la production de bioproduits et de bioénergie.
Implanté au cœur du territoire essonnien, ce projet pionnier est le fruit d’une collaboration étroite entre plusieurs acteurs publics et privés. Porté par la chaire Innovation Abiomas de la Fondation de l’Université Paris-Saclay, il mobilise des expertises issues de CentraleSupélec, d’AgroParisTech, de l’université Paris-Saclay, de la start-up Blue Planet Ecosystems et de Data4, avec le soutien du Département de l’Essonne.
Face à la croissance exponentielle de la consommation énergétique des infrastructures numériques – amplifiée notamment par le développement de l’intelligence artificielle – ce dispositif propose une réponse concrète et locale. En reproduisant artificiellement le cycle de la photosynthèse, le datacenter bio circulaire transforme une externalité thermique en ressource. La chaleur issue des serveurs est utilisée pour stimuler la culture de Chlorella, une microalgue unicellulaire à forte capacité de captation du dioxyde de carbone. Les algues produites, riches en protéines, peuvent ensuite être converties en énergie verte ou entrer dans la fabrication de produits destinés à l’agroalimentaire et à la cosmétique.
Le module expérimental, déjà opérationnel, contient mille litres de culture d’algues. Mais l’ambition est bien d’industrialiser la démarche. Un second projet à l’étude prévoit d’équiper 900 m2 de façades de datacenters avec des modules de 600 litres. Cette extension permettrait d’atteindre une production quotidienne de 20 kg d’algues tout en capturant jusqu’à 36 kg de CO2 par jour. À terme, si ce modèle était déployé à l’échelle nationale, il pourrait permettre la captation de 3 900 tonnes de CO2 par an.
Ce projet marque une rupture dans l’approche énergétique des datacenters. Une quantité importante d’énergie, estimée à près de 18 térawattheures, reste aujourd’hui inutilisée dans les installations en France. L’innovation proposée ouvre la voie à la valorisation de cette chaleur comme ressource écologique et économique, tout en favorisant l’émergence d’un écosystème local structuré autour de cette nouvelle filière. Cette ambition est partagée par une fondation universitaire, qui met en avant la convergence des disciplines et des savoirs au service de la transition écologique. Grâce à une chaire dédiée, des expertises en physique, chimie, agriculture et numérique ont été mobilisées pour lever les verrous technologiques liés à la valorisation de la biomasse. Ce projet illustre qu’il est possible d’articuler transformation numérique et transition écologique sur un territoire comme l’Essonne.
L’initiative bénéficie d’un soutien fort de la part du Département, particulièrement investi dans l’innovation environnementale. Le projet est reconnu comme exemplaire pour sa capacité à conjuguer excellence scientifique, innovation technologique, développement durable et dynamisme économique local. Cette expérience réussie illustre comment la coopération entre chercheurs, entreprises et collectivités territoriales peut faire émerger des solutions concrètes face à l’urgence climatique.
L’équipe en charge du développement souligne la portée systémique de cette innovation. Le module ne se limite pas à la captation de CO2 : il ouvre la voie à une forme d’aquaculture urbaine automatisée, capable de produire localement des protéines durables tout en valorisant l’énergie disponible. En rendant visible et utile une énergie jusqu’ici perdue, ce datacenter de nouvelle génération transforme un défi environnemental en opportunité pour l’avenir.
Marcoussis : un datacenter au service du vivant

Par Marc Blanc
Publié le 10 juin 2025 à 18h10 – Temps de lecture : 4 minutes