Les parcs éoliens en mer situés à Fécamp, Saint-Nazaire et Saint-Brieuc ont récemment procédé à une modification majeure de leurs contrats d’achat d’électricité. Cette modification permet désormais de solliciter l’arrêt total ou partiel de la production de ces parcs en période de prix négatifs sur le marché de l’électricité, un mécanisme qui marque une évolution importante dans la gestion et l’intégration des énergies renouvelables au système électrique français.
Historiquement, ces parcs étaient soutenus par des contrats d’obligation d’achat, un dispositif qui les incitait à produire au maximum de leur capacité, indépendamment des conditions du marché. Le prix de marché de l’électricité, qui fluctue selon l’équilibre entre l’offre et la demande, peut parfois devenir négatif lorsque la production d’électricité excède largement la demande. Par exemple, lors de pics de production renouvelable conjugués à une faible consommation, le prix sur le marché peut chuter au point de devenir négatif. Or, à cause de ces contrats d’obligation d’achat, les producteurs étaient assurés de vendre la totalité de leur production à un prix fixe, même lorsque le prix du marché était inférieur à zéro. Cela signifiait que l’électricité produite était revendue à perte sur les marchés, un fonctionnement qui pesait lourdement sur les finances publiques et perturbait l’équilibre du système électrique national.
Face à cette situation, le Gouvernement a engagé des discussions avec les producteurs concernés afin d’adapter les contrats d’achat. Ces négociations ont abouti à la signature d’avenants aux contrats initiaux, autorisant désormais l’arrêt temporaire des parcs en mer en cas de prix négatifs. Cette mesure vise à responsabiliser les producteurs d’énergie renouvelable, en les associant pleinement à la gestion fine de l’équilibre entre offre et demande d’électricité. En d’autres termes, ces producteurs ne sont plus seulement des fournisseurs garantis, mais des acteurs actifs de l’ajustement du système électrique.
Cette nouvelle approche a déjà fait ses preuves : les premiers arrêts de production basés sur ces avenants ont été réalisés avec succès lors du week-end des 10 et 11 mai, démontrant la faisabilité et l’efficacité de ce mécanisme. Cette évolution contribue ainsi à limiter les coûts induits par la revente d’électricité à prix négatif et à favoriser une meilleure stabilité du réseau électrique.
Par ailleurs, cette dynamique ne se limite pas aux parcs éoliens en mer. La loi de finances pour 2025 a intégré des dispositions similaires pour les anciennes installations terrestres les plus puissantes, elles aussi soutenues par des obligations d’achat. Ces dernières seront également amenées à participer au mécanisme d’ajustement grâce à un arrêté d’application soumis à consultation auprès du Conseil Supérieur de l’Énergie fin avril 2025. Un second arrêté est attendu dans le courant du second semestre de la même année, complétant ainsi ce dispositif d’ajustement généralisé.
Cette réforme s’inscrit dans une transition plus large des modalités de soutien aux énergies renouvelables. Les nouveaux contrats favorisent désormais un système de complément de rémunération, à l’exception des plus petites installations qui continuent de bénéficier d’obligations d’achat. Ce système incite naturellement les producteurs à moduler ou stopper leur production lorsque les conditions de marché le justifient, en particulier lors de périodes de prix négatifs, réduisant ainsi les distorsions économiques et renforçant la flexibilité du réseau.
L’ensemble de ces mesures traduit la volonté du Gouvernement de concilier le développement ambitieux des énergies renouvelables avec la nécessité impérative de maintenir l’équilibre et la sécurité du système électrique national. En effet, alors que la transition énergétique impose une montée en puissance rapide des capacités renouvelables, il devient crucial de gérer efficacement la variabilité intrinsèque de ces sources.
En intégrant désormais les parcs éoliens, tant en mer qu’au sol, au mécanisme d’ajustement entre l’offre et la demande, la France franchit une étape clé vers un système électrique plus agile, capable d’absorber les fluctuations de production et de consommation tout en limitant les pertes économiques. Cette approche ouvre la voie à un modèle énergétique plus durable et équilibré, où les énergies renouvelables ne sont plus seulement des producteurs garantis mais des partenaires actifs dans la gestion de la transition énergétique.