La grande majorité des jouets vendus sur les plateformes de e-commerce ne respectent pas la réglementation en vigueur. C’est le constat alarmant dressé par la DGCCRF dans son enquête annuelle 2025, menée auprès de près de 2 000 professionnels et de cinq grandes marketplaces. Selon les résultats, 90 % des jouets analysés sur ces plateformes sont non conformes et plus de 60 % présentent un danger réel pour les enfants. À l’inverse, les acteurs traditionnels du secteur, qu’ils vendent en magasin ou en ligne, affichent un niveau de conformité nettement supérieur, avec seulement 8 % de professionnels présentant des manquements graves.
L’enquête, réalisée à partir de prélèvements effectués en 2024, s’inscrit dans une mission prioritaire de la DGCCRF : la surveillance du marché des jouets, particulièrement sensibles en raison du public auquel ils sont destinés. Tous les produits identifiés comme dangereux ou non conformes ont été soit détruits, soit signalés aux plateformes concernées afin d’être retirés de la vente. Les autorités appellent néanmoins les parents à une vigilance accrue, notamment pour les achats réalisés via les marketplaces.
L’attention des enquêteurs s’est concentrée sur les grandes places de marché en ligne, qui représentaient plus de 20 % du chiffre d’affaires de la distribution de jouets en 2024. Cinq plateformes, dont quatre étrangères, totalisant chacune entre 7 et 22 millions de visiteurs mensuels, ont été ciblées. Soixante-dix références de jouets ont été achetées de manière anonyme puis analysées dans les laboratoires de la DGCCRF. Le choix s’est porté en priorité sur des produits à bas prix, majoritairement originaires d’Asie, déjà identifiés comme à risque lors d’enquêtes précédentes.
Les résultats sont sans appel : sur les 70 jouets examinés, neuf sur dix ne respectaient pas les règles, et plus de six sur dix présentaient un danger avéré. Les manquements concernaient souvent l’étiquetage ou les notices, avec par exemple l’absence de restriction d’âge ou de mention du fabricant. Les risques identifiés étaient multiples : étouffement ou strangulation liés à de petits éléments détachables ou à des cordelettes sur des déguisements et peluches, présence de substances allergisantes au-delà des seuils autorisés dans des peintures au doigt, ou encore accès trop facile aux piles, exposant les enfants à des risques d’ingestion. Tous ces produits ont été signalés aux plateformes, légalement tenues d’en supprimer les annonces.
En parallèle, la DGCCRF a contrôlé près de 2 000 professionnels du secteur, couvrant l’ensemble de la chaîne de distribution, des fabricants européens aux importateurs, en passant par les magasins spécialisés, la grande distribution et les commerces pour lesquels le jouet ne constitue qu’une activité annexe. Les contrôles, menés en magasin et sur les sites de vente en ligne, ont mis en évidence un taux de manquements graves limité à 8 %. Ces infractions ont donné lieu à des injonctions de mise en conformité, des amendes administratives, des procès-verbaux pénaux et plusieurs saisies de lots dangereux. Plus de 450 avertissements ont également été adressés pour des manquements mineurs, dans une logique d’accompagnement, notamment auprès des petits distributeurs et des fabricants artisanaux.
Les analyses en laboratoire de près de 700 jouets, ciblés car considérés comme à risque, ont toutefois révélé que 24 % d’entre eux étaient dangereux. Ce taux élevé s’explique par le ciblage de circuits de distribution spécifiques, comme les aires d’autoroute, les marchés forains, les magasins de souvenirs ou les déstockeurs. Les dangers relevés incluaient la présence de petits éléments dans des jouets destinés aux moins de trois ans, l’accès au rembourrage des peluches, mais aussi, plus récemment, des jouets à LED susceptibles de provoquer des lésions oculaires et des jouets acoustiques dépassant les seuils sonores autorisés. Au total, plus de 185 000 jouets dangereux ont été détruits afin d’empêcher leur mise sur le marché.
Face à ces constats, le gouvernement entend renforcer encore la pression sur les plateformes de e-commerce. En 2025, les contrôles de la DGCCRF ont été multipliés par trois et trente plateformes, dont seize étrangères, font désormais l’objet d’une surveillance accrue. Pour l’exécutif, les résultats de l’enquête confirment que la non-conformité et l’absence de contrôle ne sont pas marginales sur les marketplaces, mais relèvent d’un fonctionnement structurel. « Cette enquête montre une nouvelle fois que, pour les plateformes de e-commerce, la vente de produits non conformes et dangereux n’est pas l’exception, mais le modèle économique », a déclaré Serge Papin, ministre des Petites et Moyennes entreprises, du Commerce, de l’Artisanat, du Tourisme et du Pouvoir d’achat.
L’action de la DGCCRF s’inscrit également dans une dynamique européenne. Les produits jugés dangereux ont été signalés via le portail Safety Gate afin d’alerter les autres États membres et de coordonner les retraits et rappels. Par ailleurs, la France participe activement aux travaux visant à faire évoluer la réglementation européenne. Les nouvelles règles adoptées par le Parlement européen fin novembre prévoient un durcissement progressif du cadre applicable aux jouets d’ici 2030, avec un élargissement des substances chimiques interdites, un renforcement de l’analyse des risques, y compris pour la santé mentale des enfants, et la mise en place d’un passeport numérique pour chaque jouet, destiné à améliorer la traçabilité, les contrôles et l’information des consommateurs.

